vendredi 9 septembre 2011

ÉCR — Une enseignante fait expérimenter le voile à ses élèves

Le directeur de l’école polyvalente de Jonquière, Mario Bernier, a indiqué au Journal de Québec qu’il appuyait l’approche pédagogique de l’enseignante de son école qui a décidé de faire porter le voile à ses élèves, dans le cadre du cours d’éthique et de culture religieuse.

Si l’initiative de l’enseignante de 5e secondaire, France Gagnon, n’a pas soulevé de tollé chez les élèves ou les parents, l’exercice de quelques minutes a suscité maintes réactions dans la province.

« Des médias n’ont pas arrêté de m’appeler vendredi, a fait savoir le directeur. Quand on touche à la religion au Québec, ça suscite beaucoup de réactions, surtout depuis la commission Bouchard-Taylor, mais là, je ne pensais pas que ça créerait un tel tumulte. Il y a un genre de panique médiatique. »

M. Bernier a également mentionné que l’enseignante ne voulait dorénavant plus parler aux médias. « C’est sûr qu’elle est très nerveuse. Elle ne pensait pas que ça allait devenir aussi gros. »

Pas d’objection

Même si « certains », selon le Journal de Québec, ont contesté la technique utilisée par Mme Gagnon pour animer son cours, le directeur a indiqué que l’objectif de la démarche ne cachait aucune mauvaise intention. « Il a été proposé, d’une façon volontaire, que les élèves portent un petit voile pendant quelques minutes pour qu’ils aient la perception par rapport à une différenciation. »

L’enseignante aurait réalisé l’exercice avec deux groupes durant environ 15 minutes. Les garçons ont également participé.

Mme Gagnon a envoyé une lettre aux parents avant de faire l’exercice et aucun d’entre eux ne s’y est opposé. Malheureusement, le Journal de Québec ne reproduit pas cette lettre.

Beaucoup de dérapages pour le MLQ 

« On a toujours été contre. On appréhende beaucoup de dérapages, étant donné que le sujet de la religion, en soi, c’est très délicat. Une situation comme celle de cette enseignante ne fait que confirmer nos appréhensions », a affirmé Marie-Michelle Poisson, présidente du Mouvement laïque québécois (MLQ).

« Le voile, c’est la pratique la plus controversée chez les musulmans. Ça prendrait un cours complet pour l’expliquer. C’est ça le problème, les enseignants ont beaucoup de matière à voir et on risque de prendre des raccourcis. Il faudrait l’enseigner dans un cours où on a la possibilité de faire toutes les nuances, comme dans un cours d’histoire par exemple. »

Selon Mme Poisson, le fait de réduire la religion à un aspect culturel en l’enseignant dans un cours de culture religieuse est fort discutable. « Ça donne lieu à toutes sortes de caricatures », ajoute-t-elle.

Les enseignants laissés à eux-mêmes pour la CLÉ

Quant à Richard Décarie, de la Coalition pour la liberté en éducation (CLÉ), il partage le même avis. « Ça vient montrer que les enseignants sont laissés à eux-mêmes. Ils font ce qu’ils veulent. On n’est pas surpris de voir ça », a-t-il laissé entendre.


Voile dégradant pour la femme ?

Interrogé sur le débat que suscite le voile pour l’image de la femme, M.  Bernier a indiqué que l’exercice ne devait pas être interprété de cette manière et visait plutôt à permettre aux élèves de comprendre comment les gens perçoivent cette situation. On peut cependant douter que 15 minutes avec un voile sur la tête permettent de comprendre quoi que ce soit si ce n'est ce que l'enseignante voudra faire ressortir de cet exercice insolite pour les élèves, plus particulièrement on voit mal comment les élèves pourraient vraiment se mettre à la place de gens pour qui le voile fait partie de la vie de tous les jours par exemple.

« On doit développer des enfants avec un esprit critique qui sont capables de se positionner. L’algèbre, ça vient des Arabes. Va-t-on arrêter d’enseigner les mathématiques puisqu’on fêtera les dix ans des attentats du 11 septembre, dimanche ? C’est un peu ça. Le voile, c’était un petit morceau de tissu et ça a duré quelques minutes. »

Et voilà à quoi se résume le cours d'éthique et de culture religieuse ? Des approximations (les Arabes ne sont pas tous musulmans), de la mièvrerie multiculturaliste, des amalgames ? Quel rapport entre le voile, musulman donc, et les mathématiques ? Comme si on ne pouvait pas accepter des éléments scientifiques d'autres civilisations tout en réprouvant ou non des éléments religieux ou culturels de ces mêmes civilisations ! C'est cela développer l'esprit critique ?

L'algèbre « vient des Arabes » !?

Rappel : si le mot algèbre est d'origine arabe, la chose algébrique « ne vient pas des Arabes » encore moins « les mathématiques » dont l'algèbre n'est qu'une branche. Le grand algébriste El-Khwarizmi Mouhammed ibn Moussa était d'origine persane et non arabe. Ces travaux étaient eux-mêmes inspirés de ceux de l'Indien Brahmagoupta et de mathématiciens grecs comme Diophante.

Le Grec Diophante d'Alexandrie (vers 200/214 - vers 284/298), au IIIe siècle de l'ère chrétienne, fut le premier à pratiquer l'algèbre en introduisant le concept d'inconnue en tant que nombre, et à ce titre peut être considéré comme « le père » de l'algèbre.

Notons enfin que c'est à François Viète (1540-1603) que l'on doit l'idée de noter les inconnues numériques à l'aide de lettres. Son livre phare Isagoge marque en 1591 le début de la révolution algébrique qui, poursuivie par Thomas Harriot, William Oughtred, Albert Girard et René Descartes, fondera les notations de l'algèbre contemporaine.

Bref, les « Arabes » (en fait la civilisation arabo-musulmane dont beaucoup de savants ne sont ni arabes ni musulmans comme les nombreux médecins syriaques de la Bagdad abbasside) forment un chaînon de l'invention de l'algèbre, mais on ne peut en rien dire que « l'algèbre vient des Arabes » et encore moins « les mathématiques ».

Voir aussi sur cette affaire

Comment on a traité les parents à Jonquière par Myriam Ségal, journaliste dans la région






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8 commentaires:

Josick a dit…

ni le zéro d'ailleurs mais c'est bien le shifrt (rien) qui a donné son nom aux "chiffres".
La touche "shift", celle qui ne fait rien d'elle-même, mais opérant un décalage (cf. les vieilles machines à écrire) magnifie la lettre en majuscule ; tout comme le zéro décalant le 1, le magnifie en 10...

De là, des calculs sans limites prélude à la production industrielle de masse.

Nota : interprétations toutes personnelles.

Jack a dit…

Josick,

La touche "La touche "shift" n'a pas de rapport avec "chifr"/"sifr" en arabe.

Cela déplace simplement le bras qui frappait les lettres sur les machines à écrire.

Sinon, l'algèbre arabe quelle blague. Aussi arabe que les chiffres arabes qui ne le sont pas (ils sont hindous, même les arabes disent les chiffres hindi!)

Anonyme a dit…

Les journaux de la fin de semaine signalait l'importance de la montée de l'islamophobie depuis le 11 septembre 2001.

Avec cette histoire, ces mêmes journaux n'ont pas manqué l'occasion de chatouiller cette fibre.

Regrettable

Marre des anonymes a dit…

Ah, noter Anonyme pontifiant


qui nous ressors le couplet de l'«islamaophobie » !


Faut le faire.

Alors qu'on dite juste ici :

1) C'est un exercice idiot qui n'« expliquera rien » en soi aux jeunes ados captifs de leur prof.

2) Le prof fait des raisonnements idiots : je mets un bout de tissu, je deviens « tolérant », je ne suis pas « islamophobe ». C'est d'une bêtise insigne.

3) En fait le prof, fait des amalgames et empêche tout développement d'un véritable esprit critique.

4) Répétons-le : on n'a pas besoin d'être pour ou contre le voile islamique parce qu'à une époque très très reculé des musulmans (pas nécessairement arabes) ou des orientaux (pas nécessairement arabes) ont traduits des traités grecs et hindous en arabe pour des califes de Bagdad. Ça n'a absolument aucun rapport.

5) La prof pourrait se demander pourquoi les sciences «arabes» n'ont pratiquement rien découvert durant les dix (10) derniers siècles.

Au lieu de quoi, on a un Anonyme châtré et islamolâtre qui nous ressort l'« islamophobie » !

Je crains que ce soit notre prof d'ECR encore ! Les pauvres enfants qui lui sont confiés par des parents bien trop démunis ou confiants.

Anonyme a dit…

En plus notre professeur pro-ECR anti-islamophobe commet une faute de grammaire:
"Les journaux de la fin de semaine signalAIT"

Pitoyable!

Anonyme a dit…

La classe est un milieu fragile que l'on doit protéger. La médiatisation sauvage et incontrôlée de ce que les enseignants y font risque d'avoir des effets pervers fort malheureux en particulier, d'éteindre la créativité pédagogique de ces mêmes enseignants. Qui voudra prendre des initiatives nouvelles si, tout d'un coup et sans prévenir, il se trouve dénoncé par l'opinion publique.

Si des activités pédagogiques dérogent aux programmes pédagogiques légalement et légitiment établis, il existe à l'intérieur même des écoles des instances pour en débattre et prendre, le cas échéant, les mesures utiles pour redresser la situation.

Et si on n'est pas d'accord avec un programme, on prend les mesures appropriées pour les contester et non la voie médiatique de la dénonciation d'une activité pédagogique légitime.

Marre du Monopole a dit…

Anomyne-la-classe-est-milieu-fragile,

Vous vous êtes trahi par votre prose : vous êtes un enseignant ou, pire, un pédagogue.

Les parents peuvent critiquer cet exercice idiot et inutile, ne vous en déplaise.

Les enfants des autres ne sont pas vos otages.

Durandal a dit…

« éteindre la créativité pédagogique des enseignants », quelle phrase mordante. C'est précisément ce qu'on veut : qu'ils arrêtent de se méprendre pour des apprenti-sorciers. Qu'ils soient créatifs sans perturber l'intellect de nos enfants avec notre propre argent.

Pour ce qui est de l'histoire de l'algèbre, notons que c'est par l'entremise du traducteur chrétien melkite Qusta Ibn Luqa de Baalbek qu'El-Khwarizmi eut accès aux Arithmétiques de Diophante d'Alexandrie.

Jusqu’au XIe siècle, les mathématiciens arabes n'utilisaient aucun symbole dans leurs exposés et écrivaient les nombres en lettres arabes plutôt qu'en chiffres indiens.

Les Arabo-musulmans ont connu la numérotation indienne par l’entremise des Araméens chrétiens. La plus ancienne utilisation des chiffres indiens dans des manuscrits arabes se trouvent dans les ouvrages mathématiques composés au VIIe siècle par Sévère Sebokht, l’évêque monophysite de Kennesrin (sur le nord de l’Euphrate).

Sources : L'Encyclopédie Universalis et Aristote au Mont Saint-Michel de Sylvain Gouguenheim.